Luz Maria De-Regil.

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Par Luz Maria De-Regil, Directrice des services techniques mondiaux et conseillère technique principale à Nutrition International

Four girls seating in a classroom in Niger Sud Dogo

*Cet article a initialement été publié sur Devex*

Cette semaine je vais à Londres pour participer au Sommet sur la planification familiale 2017. Cet événement, organisé par la fondation Bill et Melinda Gates, le Département britannique du développement international (DFID) et le Fonds des Nations Unies pour la population (UNFPA), réunit des chefs de file mondiaux de la planification familiale, de la santé, des donateurs – et quelques improbables suspects, comme moi.

À première vue, les liens entre la nutrition et la planification familiale pourraient ne pas être évidents. Quand je travaillais à l’Institut national de médecine périnatale au Mexique, ils sont vite devenus clairs. J’ai vu par moi-même les effets dévastateurs d’une mauvaise nutrition et de l’absence de planification familiale, sur la santé des adolescentes notamment. J’en ai été plus que jamais convaincue non seulement de la nécessité d’améliorer la nutrition des femmes et des filles, mais aussi de l’interdépendance de la santé sexuelle et de la reproduction avec la nutrition.

Une manifestation évidente de cette interdépendance est le nouveau partenariat entre Nutrition International et UNFPA. Rendu possible par notre programme La nutrition, levier de développement et d’influence en faveur du changement (N-LIFT), financé par le gouvernement canadien, ce partenariat intégrera la fourniture de conseils en nutrition, de formation et de suppléments de fer et acide folique aux adolescentes et aux femmes aux programmes en planification familiale et santé maternelle. Par des approches novatrices pour mieux rejoindre les adolescentes, ce partenariat bénéficiera à 500 000 femmes et filles au Nigeria et au Sénégal, dans sa première phase, et pourrait être étendu à 15 millions de femmes et de filles chaque année.

3 raisons pour lesquelles l’intégration de la nutrition à la planification familiale change la donne

1. Les adolescentes ont des besoins urgents non satisfaits en matière de planification familiale et de nutrition.

Les femmes et les filles sont deux fois plus susceptibles de souffrir de malnutrition que les hommes et les garçons, et les plus exposées sont les adolescentes. En dépit du fait que l’adolescence est une période de transformation rapide au plan physique, mental et émotionnel, les plus négligées par les interventions en nutrition et planification familiale sont les adolescentes. En fait, la grossesse et l’accouchement sont l’une des principales causes de décès chez les jeunes femmes de 15 à 19 ans.

Les coûts de l’inaction en nutrition et en santé sexuelle et de la reproduction des adolescentes sont effarants. La malnutrition pendant la grossesse, en particulier les grossesses précoces à haut risque, peut entraîner une insuffisance pondérale à la naissance et un arrêt de croissance prématuré et accroître le risque de décès des mères comme des nouveau-nés. L’anémie ferriprive, qui affecte 300 millions d’adolescentes, est l’une des cibles de santé mondiale les moins en voie d’être atteintes, alors que nous savons que le fer et l’acide folique réduisent l’anémie et l’incapacité. L’anémie est également la toute première cause des années de vie ajustées sur l’incapacité chez les adolescentes, réduisant l’aptitude des filles et des femmes à se développer, apprendre, gagner leur vie et diriger, et opposant d’importants obstacles à l’égalité des sexes et à l’émancipation des femmes et des filles.

De même, le manque d’accès à la planification familiale peut avoir un impact majeur sur la nutrition et le bien-être, notamment :

  • augmenter le risque d’infections au VIH et transmises sexuellement, qui peuvent affecter l’état nutritionnel des femmes et de leurs enfants, si elles sont enceintes;
  • être une menace pour l’égalité des sexes, en réduisant les chances des filles et des femmes de terminer leur formation, se trouver un emploi ou participer pleinement à la société;
  • réduire la croissance économique, du fait de la participation réduite des femmes à la main d’œuvre, à l’innovation et aux revenus, et des coûts accrus en soins de santé.
2. L’intégration de la planification familiale et de la nutrition renforce la portée et l’impact

En dépit du fait que la génération actuelle d’adolescents est la plus importante de l’histoire de l’humanité, la plupart des systèmes en place dans les pays en développement sont encore adaptés aux besoins des jeunes enfants et des adultes.

Des investissements sont nécessaires pour mieux rejoindre les adolescents. La meilleure façon d’en optimiser la portée et l’impact est de recourir à des plateformes de prestations qui intègrent les services de santé de manière holistique, sans ajout important de coûts ou de complexité.

La réunion des services qui étaient en grande partie distincts auparavant permet de renforcer chacun d’eux et de multiplier les avantages pour la santé et le bien-être des adolescents. En faisant cela, nous pouvons accroître le potentiel de santé, d’éducation et de revenus de millions de personnes.

Une collaboration accrue peut aider à renverser les obstacles qui empêchent les femmes et les filles d’exercer leur droit à la planification familiale et à la nutrition – ce qui est tellement crucial pour s’attaquer à l’égalité des sexes, la pauvreté mondiale et l’émancipation économique.

3. Les interventions en nutrition et en planification familiale se renforcent mutuellement

Non seulement il est logique, du point de vue de l’efficacité des prestations, d’intégrer la nutrition et la planification familiale, mais le faire mène également au renforcement mutuel des résultats sur la santé.

En intégrant la nutrition aux programmes en planification familiale, nous pouvons parvenir à améliorer la santé pendant la grossesse et les issues de cette dernière, et à réduire les taux de prévalence de l’arrêt de croissance prématuré, de la maladie des avortons et de la mortalité infantile, juvénile et maternelle.

En intégrant la planification familiale aux programmes en nutrition, nous pouvons réduire les taux de grossesses précoces et les grands risques pour la santé de la mère et de l’enfant, en plus des effets à long terme d’une grossesse précoce. Par ailleurs, les programmes en planification familiale sensibilisent à l’espacement des naissances et augmentent la capacité à le mettre en œuvre, fournissant une période critique aux mères pour rétablir leur état nutritionnel et avoir des grossesses en santé et sûres.

Alors, même si à première vue ma participation avec Nutrition International au Sommet sur la planification familiale 2017 pouvait sembler un peu inattendue, une intégration et une collaboration accrues offrent des possibilités immenses, tant pour la santé sexuelle et de la reproduction des adolescents que pour leur nutrition.

Nous sommes à un croisement. Il est temps de prendre des mesures concertées au niveau mondial afin de renforcer la volonté politique, la capacité technique et les politiques et ressources et mettre à l’échelle la planification familiale et la nutrition pour satisfaire les besoins et les droits des adolescentes. Le partenariat N-LIFT entre UNFPA et Nutrition International est un exemple de ce mouvement vers une plus grande intégration à toutes les plateformes traditionnelles. Quand nous travaillons tous ensemble pour atteindre nos buts et objectifs communs, un monde plus juste et plus prospère est possible.