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Lorsqu’on lui a demandé pourquoi son entreprise participait au programme d’enrichissement des aliments (PEA), Muhammad Umer, responsable de l’assurance qualité chez Agro Processors and Atmospheric Gases Pvt Ltd à Karachi, au Pakistan, a tout simplement répondu : « Il s’agit de résoudre le problème de la malnutrition au Pakistan. »

Grâce à l’aide financière du gouvernement britannique, Nutrition International et Mott MacDonald ont mis en place le programme d’enrichissement des aliments. Ce programme s’adressait aux fabricants du secteur formel au Pakistan afin d’enrichir 95 % de l’huile comestible en vitamine A et D. Ces deux vitamines sont respectivement essentielles au développement d’un système immunitaire sain et à la croissance des os. Selon l’enquête nationale sur la nutrition menée au Pakistan en 2018, les carences en vitamines A et D touchent particulièrement les femmes et les enfants. De plus, la carence en vitamine A est la principale cause de cécité évitable chez les enfants et de cécité nocturne chez les femmes enceintes. Sur une période de cinq ans, le programme a mobilisé les principaux intervenants pour combler les lacunes qui existaient dans la réglementation, la mise en œuvre et l’application des règlements pour transformer l’industrie.

Alors que Nutrition International poursuit ses , les fabricants d’huile et le personnel des autorités alimentaires du secteur public ont partagé leur expérience de travail avec le programme d’enrichissement des aliments.

Formation et assurance qualité

La formation dispensée par Nutrition International a aidé l’usine d’Umer à rendre son processus d’enrichissement plus cohérent. « La formation organisée par Nutrition International a mis les maîtres formateurs à notre disposition », a-t-il partagé. « Ils nous ont transmis de très bonnes connaissances et des solutions pertinentes à nos problèmes. Ils nous ont vraiment aidés à améliorer notre système. »

L’une des améliorations portait sur la rationalisation du processus d’ajout de la solution prémélangée de vitamines A et D  à l’huile. Pour que le mélange soit conforme, le processus requiert une grande précision en ce qui a trait à la température et au temps de mélange. Umer a également souligné l’avantage d’utiliser les trousses de tests rapides fournis par le PEA pour analyser la qualité à l’interne avant que le produit ne soit analysé par un laboratoire tiers.

Une fois les résultats confirmés, les fabricants ont reçu le sceau d’approbation pour les emballages d’huile comestible – littéralement. En effet, le PEA, en collaboration avec le gouvernement, a créé un logo d’enrichissement à apposer sur l’emballage de tous les produits à base d’huile comestible et de ghee enrichis afin que les clients puissent facilement les identifier. Umer s’en sert pour guider les habitudes d’achat de sa propre famille, mettant ses connaissances industrielles en pratique à la maison. En tant que responsable de l’assurance qualité, j’ai dit à mon épouse : « Quand tu achètes quelque chose au marché, examine d’abord l’étiquette pour déterminer s’agit bien d’un produit enrichi », raconte Umer. « Et en ce qui concerne l’huile comestible, cherche pour le logo du PEA. »

Organismes de réglementation

Les responsables du PEA ont travaillé en étroite collaboration avec toutes les autorités alimentaires provinciales pour rationaliser la réglementation et assurer la cohérence entre les provinces.

La Dre Seema Ashraf, analyste publique de l’Autorité alimentaire du Sindh, a souligné l’importance du soutien de Nutrition International en matière de formation, de sensibilisation et d’opérations techniques. Ce soutien était particulièrement important pour les petites usines et celles de taille moyenne, car elles ressentent plus durement le coût initial du processus d’enrichissement comparativement aux grandes usines. « Au début, il y avait une certaine réticence, mais aujourd’hui, tout le monde s’est mobilisé. »

En tant qu’auditrice de la salubrité alimentaire, la Dre Ashraf a noté que pour réussir l’enrichissement alimentaire, il faut faire le lien entre l’objectif de santé publique, les règlements techniques et les normes juridiques. « L’enrichissement des aliments constitue une stratégie durable de lutte contre les carences en micronutriments. Très rentable et puissante, cette stratégie offre la possibilité d’atteindre une grande partie de la population, et ce,  avec un coût et des efforts minimes », a-t-elle confié.

« Le programme a connu un grand succès », a déclaré la Dre Shazia Yaqub, analyste publique de l’Autorité alimentaire du Pendjab. Comme son homologue du Sindh, l’autorité se charge de vérifier si les aliments sont sûrs et correctement enrichis dans la bonne fourchette selon la norme alimentaire.

« Le renforcement des capacités fut pour nous le premier avantage de cette collaboration », a déclaré la Dre Yaqub. Le PEA a fourni un équipement de chromatographie liquide à haute performance (CLHP) pour mesurer la quantité de vitamine A et D présente dans les produits. « En plus de fournir l’instrument, ils ont aussi mis à notre disposition une personne formée aux rudiments de la CLHP pour l’enrichissement. Ce type de soutien ciblé a favorisé le renforcement des capacités. »

Collaboration et travail d’équipe

Ingénieur chimiste et responsable des processus chez Mahboob Industries à Lahore, au Pendjab, Bahram Khan a voulu appliquer ses connaissances à l’industrie alimentaire. « En tant qu’être humain, je m’intéresse à l’amélioration de la transformation des aliments. C’est la principale raison pour laquelle j’ai fait le saut dans l’industrie alimentaire, ayant remarqué de nombreux points à améliorer », a-t-il déclaré. Il était donc tout naturel pour son entreprise de collaborer avec le PEA.

Avant le soutien de Nutrition International, son usine enrichissait manuellement les produits d’huile comestible et de ghee. Après avoir participé à la formation, ils ont ajouté des réservoirs de dilution au processus. « Il ne fait aucun doute que cela a amélioré l’enrichissement », a-t-il ajouté.

L’un des principaux aspects de la formation visait à transmettre la logique derrière les étapes à suivre. Il faut pouvoir bien saisir l’importance des analyses, de la conservation des données et de la nécessité de l’enrichissement généralisé qui cible les carences en micronutriments dans la population pakistanaise pour réussir un programme d’enrichissement. Mais Khan a précisé que la manière de dispenser la formation l’a également impressionné : « Je tiens à souligner le comportement de l’équipe. Elle avait une approche différente, très amicale. En plus de nous prêter mainforte, l’équipe a réellement éveillé notre intérêt pour le programme. L’équipe de Nutrition International a su stimuler notre énergie et nous convaincre de l’importance d’adopter ce programme impressionnant. »

Lorsqu’on lui a demandé s’il y avait eu des difficultés en cours de route, Khan a fait référence à la détermination. « Nous étions convaincus de vouloir adopter ce système, même si cela représentait des modifications à notre chaîne de transformation… comme le dit le vieil adage, « Qui veut, peut » alors tout est devenu plus facile », a-t-il expliqué. Il se sent responsable, en tant que transformateur alimentaire, d’aider les gens à prévenir des problèmes de santé. « Je suis convaincu que nous allons poursuivre l’enrichissement. Nous allons continuer le bon travail d’enrichissement, y compris les analyses. »

Donner l’exemple

Dans toutes les entreprises, les employés ont fait état de leur responsabilité à fournir aux clients un produit de qualité, enrichi conformément aux règlements gouvernementaux et avantageux pour la santé publique. « Le personnel de Nutrition International nous a expliqué la prévalence des carences et a fait valoir à quel point l’enrichissement est essentiel pour notre population », a déclaré Haroon Qadir, directeur de production au sein du Khalis Group of Industries à Sheikhupura, au Pendjab. « Nous avons cette responsabilité, car c’est nous qui produisons ces aliments. Il se peut que la population pakistanaise ne soit pas consciente de la nécessité d’avoir des produits enrichis, mais nous, les producteurs et nous, les fabricants, sommes responsables. »

Il a déclaré que le programme a permis de normaliser toutes les parties du processus d’enrichissement. « Toutes les étapes forment maintenant une chaîne bien définie : les bons de commande, la livraison,  les analyses, les prétests, les analyses post-enrichissement, le produit final, la quantité de prémélange ajoutée, la quantité de produits enrichis. Tout est inclus. »

Qadir croit aussi que la subvention initiale prévue dans le cadre du programme peut servir d’exemple à d’autres industries. Pendant les six premiers mois, le PEA couvrait 20 % du coût du prémélange d’enrichissement en micronutriments et 10 % au cours des 18 mois suivants. Les usines recevaient seulement la subvention après confirmation que leur produit était enrichi dans la fourchette recommandée. La subvention a incité les usines à participer au programme, en particulier les petites usines qui avaient à soutenir le coût de l’approvisionnement en prémélange. « La subvention offre une mesure incitative attrayante qui vous fait entrer dans la sphère de l’enrichissement. Une fois dans le réseau, vous vous conformez aux règlements. » Comme il existe d’autres secteurs où l’application des normes d’enrichissement se fait toujours attendre, Qadir croit que le programme peut servir d’exemple pour attirer les acteurs industriels d’autres groupes d’aliments de base à adopter l’enrichissement.

Grâce à un nouveau financement du gouvernement du Canada et de la Fondation Bill & Melinda Gates, Nutrition International tirera parti de ses enseignements tout en continuant à travailler en étroite collaboration avec le gouvernement du Pakistan pour améliorer l’enrichissement des aliments dans d’autres secteurs. Le programme continuera à s’attaquer à la crise de la malnutrition et à améliorer la santé des femmes et des enfants en créant des systèmes durables pour enrichir les aliments de base qui améliorent l’alimentation quotidienne.